Cannabis Light n’est pas Cannabis Zero

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Cannabis Light n’est pas Cannabis Zero

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Si les produits au cannabidiol (CBD) ne sont pas psychoactifs, la plante dont il est extrait, le cannabis light, contient une petite quantité de THC : une quantité détectable selon les dernières études ...

Publié le: 
23/05/2019

Le chanvre, ou cannabis sativa, est une plante résineuse et fibreuse. La résine contient plusieurs centaines de molécules qui confèrent à la plante des propriétés biologiques, alors que la partie fibreuse est une matière première de choix pour la fabrication de cordages. La part respective de résine et de fibre est déterminée par des facteurs génétiques et par l’environnement climatique. Dans les zones chaudes du globe la proportion de résine est largement supérieure à celle de fibre alors que c’est l’inverse en zone tempérée, d’où les appellations « chanvre indien » pour les plants riches en résine et « chanvre textile » pour les autres. En Europe, il est permis de cultiver du cannabis dont la teneur en THC ne dépasse pas 0,2%. Par contre l’autorisation de commercialisation du produit, souvent nommé « cannabis light », varie d’un état de l’union à l’autre. En France, son utilisation est strictement encadrée comme l’a rappelé la MILDECA en 2018.

La résine du cannabis contient des phytocannabinoïdes (cannabinoïdes d’origine végétale) dont les plus connus sont le THC et le cannabidiol (CBD) - voir article Cannabidiol (CBD), une molécule qui fait parler d’elle. Le THC est responsable des effets psychotropes ; il figure sur la liste des stupéfiants dont la production, la commercialisation et la consommation sont interdits, même si plusieurs états de par le monde ont aujourd’hui levé toutes ces interdictions. En France, la consommation de cannabis est réprimée par la loi. Le CBD, contrairement au THC, est une molécule sans effet psychoactif. Elle fait l’objet de nombreuses recherches car des études précliniques ont montré que le CBD possède des propriétés anti-inflammatoires, anti-convulsives, anxiolytiques, analgésiques, neuroprotectrices, anti-oxydantes. Même s’il reste à valider ces effets thérapeutiques chez l’homme, un réel engouement pour le CBD s’est développé et les ingénieurs agronomes se sont évertués à créer des variétés de cannabis riches en CBD, jusqu’à 25% contre moins de 1% de THC.

Le cannabis light peut se présenter sous diverses formes ; de nombreux forums expliquent comment le fumer et quels sont les effets attendus. Bien que la teneur en THC du cannabis light soit faible, des chercheurs se sont demandé quel était le devenir du produit dans l’organisme. Cela permet par exemple de savoir si sa consommation est compatible avec la réglementation de la sécurité routière. En France, l’infraction au code de la route est constituée si la concentration en THC dans la salive dépasse 15 ng/ml, celle dans les urines 50 ng/ml et, depuis la loi du 12 juin 2003, il n’y a plus de notion de seuil en matière de dépistage sanguin.

Deux études ont été récemment publiées. Les cigarettes “light” testées étaient préparées à partir de plants de cannabis light. 
Dans la première étude, 6 sujets ont fumé chacun 1 cigarette contenant 0,16% THC (soit 1,6 mg par cigarette) et 6 autres, 4 cigarettes du même type sur une durée de 4 heures. Les mesures dans le sang et dans la salive étaient effectuées une demi-heure après la fin de la dernière cigarette puis toutes les heures jusqu’à la 5ème heure. 
Une demi-heure après une seule cigarette, la concentration moyenne de THC dans le sang variait de 7 à 10 ng/ml et dans la salive de 5 à 15ng/ml. Une demi-heure après la dernière des 4 cigarettes, la teneur du sang en THC allait de 14 à 18 ng/ml et, dans la salive, de 11 à 24 ng/ml. 

Pour 1 ou 4 cigarettes de cannabis light fumées, le THC revenait en dessous du seuil de positivité salivaire deux heures après la dernière, et il fallait près de 4 heures pour que le THC ne soit plus détectable dans le sang. 

Dans les urines, le THC-COOH (métabolite du THC excrété dans les urines) était mesurable 8h après en très faible quantité (0,2 ng/ml) chez les 6 sujets ayant fumé une seule cigarette, et disparaissait à 24h. Les concentrations étaient un peu plus élevées (1,4 ng/ml) chez ceux ayant fumé 4 cigarettes et restaient positives à 24h. 
Aucun des 6 participants ayant fumé les 4 cigarettes n’ont décrit avoir ressenti des effets psychoactifs ; retournés chez eux dès la fin de la session, ils ont par contre rapporté s’être rapidement assoupi et avoir dormi environ 4 heures. 

La deuxième étude incluait une seule personne et comportait deux sessions. 
La première consistait à fumer une seule cigarette contenant 0,9% THC (soit 1,6 mg par cigarette). La concentration sanguine maximale de THC était de 2,7 ng/ml, observée une demi-heure après la cigarette, et passait en dessous du seuil de détection de la méthode au prélèvement effectué à 1 heure. La concentration dans la salive et dans l’urine était toujours négative. 
La deuxième session a consisté à fumer 2 cigarettes par jour, à environ 8 heures d’intervalle, sur une période de 10 jours. Des prélèvements sanguins étaient effectués avant la 2ème cigarette du jour et une demi-heure après celle-ci. Après la toute première cigarette de la série, le THC a été mesuré à 4,5 ng/ml. Pour les suivantes, le THC n’était jamais détectable avant et à faible concentration après, entre 0,5 et 0,7 ng/ml. Sur les 10 échantillons d’urine prélevés, deux, ceux du 4ème et du 8ème jour, indiquaient la présence de THC-COOH. L’étude n’aborde pas l’existence ou non d’effets psychoactifs.

Si fumer du cannabis light n’a pas d’effet psychoactif, cela peut malgré tout entraîner des concentrations sanguines et salivaires de THC relevant de l’infraction en cas de conduite d’un véhicule. 

Auteur(s): 
Bertrand

Nalpas

MD, PhD, Directeur de recherche émérite - Inserm

MD, PhD
Directeur de recherche émérite
Département Information Scientifique et Communication de l'Inserm

 
Le cannabis light utilisé pour fabriquer des produits au CBD contient une faible quantité de THC
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