La dernière définition scientifique de l’addiction est assez récente puisqu’elle date de 2013 : alors qu’entend-on aujourd’hui par addiction ?
« Je suis trop addict », « Il est sneakers addict », « Addict de toi » . L’utilisation du terme “addict” ou “addiction” est partout. On est « addict » au sport, au travail, au fromage, à la lecture, au smartphone, à un parfum, à un jeu ou au shopping comme on est « addict » au tabac, au cannabis, à l’alcool… Si bien qu’aujourd’hui « être addict » est un comportement considéré comme banal voire normal : « On est tous addict à quelque chose !… ».
Du point de vue médico-psychologique et scientifique, l’addiction à une substance ou à un comportement est un trouble mental qui génère de la souffrance et nécessite une aide pour s’en sortir et rétablir son équilibre.
Entre les deux points de vue, le courant et le scientifique, l’addiction peut être considérée au départ comme un comportement dans lequel l'effet psychoactif d'une substance et/ou d'une activité offre des satisfactions et/ou un mieux-être. Cependant, en fonction des vulnérabilités de la personne et des événements de vie, ce comportement peut basculer vers la maladie addictive proprement dite.
Les critères diagnostiques de l’addiction ont été définis par une communauté d’experts et sont publiés dans un ouvrage nommé “Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders” dont la cinquième version (DSM-5) est parue en 2013. Etant donné que des substances légales comme l’alcool ou le tabac peuvent aboutir à une addiction autant que les substances illégales, les auteurs du DSM ont préféré parler de « trouble de l’usage de la substance » (en anglais : substance use disorder).
En ce qui concerne les comportements, le DSM-5 ne retient à ce jour que les jeux d’argent comme source possible d’addiction, et non les jeux vidéos sur console ou par internet, le smartphone..., mais cela pourrait changer en fonction de l’évolution des connaissances scientifiques.
« Je bois 3 sodas ou 3 bières par jour ; je fais du footing 1h par jour ; je joue à un jeu de grattage tous les jours. Suis-je addict pour autant ? ». La consommation d’un produit ou la pratique d’un comportement ne peut à lui seul définir l’addiction. Il n’y a pas non plus aujourd’hui de « marqueurs biologiques » permettant de poser le diagnostic d’addiction. Celle-ci est définie uniquement par des critères comportementaux.
Ces critères associent principalement :
A noter qu’aucun de ces critères ne fait appel à la quantité consommée ou à la fréquence de consommation. En fait ces critères évaluent d’une part la force d’attraction de la substance ou du comportement sur le consommateur, tout comme un aimant attire le fer ; d’autre part ils mesurent les contraintes et les restrictions de liberté que la consommation entraîne pour le sujet (obligation de toujours en avoir ou d'aller en chercher immédiatement, obligation de consommer en raison du sevrage, réduction de la vie sociale pour pouvoir consommer ou se remettre des excès…).
Retrouvez les 11 critères définis par le DSM-5 en français sur le site de la Mildeca ou sous forme de questionnaire en ligne sur le site Addict Aide. A noter que dès que le nombre de critères positifs est supérieur à 3, il est conseillé d’aller en parler à un spécialiste.
Si aucun critère n’est positif, il n’y a bien sûr aucun souci à se faire. Par contre avoir ne serait-ce qu’un seul critère positif doit faire réfléchir parce que cela peut être le point de bascule, le début d’une glissade vers un trouble de l’usage plus ennuyeux et vers la maladie addictive.
Nalpas
MD, PhD
Directeur de recherche émérite
Département Information Scientifique et Communication de l'Inserm
Rigaud
A. Rigaud, psychiatre des hôpitaux, Président de l’Association Nationale de Prévention en Alcoologie et Addictologie